Économie de l’Érythrée : entre potentiel minier et défis structurels
L’Érythrée, située dans la Corne de l’Afrique, possède une économie unique marquée par un fort potentiel minier, une prédominance de l’agriculture de subsistance et une gestion étatique centralisée. Depuis son indépendance de l’Éthiopie en 1993, le pays cherche à établir un modèle économique stable, malgré les obstacles liés aux conflits régionaux, à l’isolement international et à des politiques économiques controversées.
1. Vue d’ensemble de l’économie érythréenne
L’économie de l’Érythrée repose principalement sur trois piliers : l’agriculture, l’exploitation minière et les envois de fonds de la diaspora. Le produit intérieur brut (PIB) reste modeste, avec une croissance inégale selon les années. Le gouvernement joue un rôle prépondérant dans tous les secteurs économiques, avec peu de place laissée à l’entreprise privée.
Le pays fait également face à un important défi : l’autosuffisance alimentaire, un objectif que les autorités poursuivent malgré les aléas climatiques et les limitations structurelles.
2. L’agriculture : un secteur vital mais vulnérable
Environ 70% de la population active travaille dans l’agriculture, principalement dans des activités de subsistance. Cependant, ce secteur ne contribue qu’à une petite fraction du PIB (autour de 10%). Les principales cultures incluent le sorgho, le millet, le maïs et les légumes.
Les défis rencontrés par le secteur agricole en Érythrée incluent :
- Une dépendance à la pluviométrie, dans un climat semi-aride.
- Le manque d’infrastructures d’irrigation.
- La dégradation des sols et la désertification.
Pour remédier à cela, le gouvernement a mis en œuvre plusieurs projets de récupération des terres, de stockage de l’eau et de promotion de l’agriculture durable.
3. Le secteur minier : moteur de croissance
Le véritable pilier de l’économie érythréenne est le secteur minier. Le pays est riche en ressources naturelles, notamment en or, cuivre, zinc, potasse et gaz naturel.
La mine de Bisha, exploitée en partenariat avec des entreprises étrangères, a été la première grande exploitation minière du pays. Elle produit principalement de l’or, du cuivre et du zinc. D’autres projets miniers, comme celui de Colluli pour l’extraction de potasse, attirent des investissements étrangers, malgré les défis liés à la gouvernance et aux sanctions internationales passées.
Le secteur minier représente une part importante des recettes d’exportation de l’Érythrée et constitue un levier essentiel de développement économique.
4. Industrie et infrastructures
Le secteur industriel reste limité, concentré sur la transformation de produits agricoles, la fabrication de textiles, la production de matériaux de construction et quelques industries légères.
Le développement des infrastructures est également une priorité du gouvernement. Des projets sont en cours pour améliorer :
- Le réseau routier national.
- Les capacités portuaires (notamment à Massawa et Assab).
- La production d’énergie solaire et hydraulique.
5. Le commerce extérieur : exportations minières et dépendance aux importations
L’Érythrée exporte principalement des ressources minières (or, cuivre, zinc), ainsi que des produits agricoles en faible quantité. Ses principaux partenaires commerciaux sont la Chine, les Émirats arabes unis et certains pays européens.
Le pays dépend largement des importations pour répondre à ses besoins en produits alimentaires, équipements, carburants et biens de consommation. Ce déséquilibre commercial fragilise l’économie et accentue la vulnérabilité extérieure.
6. Diaspora et envois de fonds
La diaspora érythréenne joue un rôle central dans le soutien à l’économie nationale. Des centaines de milliers d’Érythréens vivent à l’étranger, notamment en Europe, aux États-Unis et au Moyen-Orient.
Les envois de fonds représentent une source majeure de devises pour le pays. En outre, le gouvernement prélève une « taxe de la diaspora » de 2% sur les revenus des Érythréens expatriés, ce qui constitue une ressource budgétaire non négligeable.
7. Défis économiques majeurs
Malgré son potentiel, l’économie érythréenne fait face à de nombreux défis structurels :
- Isolement international : les sanctions passées (levées en 2018) ont limité les investissements étrangers et les échanges.
- Contrôle étatique rigide : l’intervention de l’État dans tous les secteurs dissuade l’initiative privée.
- Service militaire obligatoire : il prive le marché du travail d’une grande partie de sa main-d’œuvre productive.
- Faiblesse de l’État de droit : l’absence de système bancaire moderne et la faiblesse de la gouvernance freinent le développement du secteur privé.
De plus, l’absence de statistiques économiques fiables complique l’évaluation des performances et des besoins du pays.
8. Perspectives d’avenir
Pour renforcer son développement, l’Érythrée devra :
- Améliorer le climat des affaires pour attirer les investisseurs.
- Libéraliser certains secteurs économiques.
- Moderniser son système éducatif et favoriser la formation professionnelle.
- Réformer le service national et valoriser le capital humain.
La signature de l’accord de paix avec l’Éthiopie en 2018, bien qu’ayant suscité de grands espoirs, n’a pas encore entraîné de bouleversements économiques majeurs. Toutefois, la stabilisation politique et régionale pourrait ouvrir la voie à une intégration économique plus large dans la Corne de l’Afrique.
Conclusion
L’économie érythréenne est à la croisée des chemins. Si elle reste marquée par le centralisme étatique et des défis persistants, elle bénéficie également d’un fort potentiel dans les secteurs minier et agricole. Pour que l’Érythrée parvienne à un développement durable et inclusif, une ouverture progressive, un cadre légal favorable à l’investissement et une meilleure gestion des ressources humaines seront essentiels. À long terme, le pays pourrait tirer parti de sa position géographique stratégique et de ses ressources naturelles abondantes pour s’imposer comme un acteur économique régional.